Orages d'acier
Tout au long des années 2000, les gouvernements de « gauche » et de «
droite » ont mené alternativement une offensive pour étendre l’état
d’exception juridique qui permet d’expérimenter la contre-insurrection
endocoloniale. Entre 2001 et 2009, 17 lois portant sur « la lutte contre
l’insécurité » sont votés les unes après les autres, au nom de la «
lutte contre le terrorisme », « la délinquance des mineurs », « la
criminalité » ou « l’immigration clandestine ». Elles favorisent l’extension et la diversification des formes contemporaines de la violence policière.
En 2001, le gouvernement Jospin fait voter la loi de sécurité
quotidienne (LSQ) qui pose les bases d’un vaste programme
d’intensification du contrôle des classes populaires par le
redéploiement des forces de l’ordre et l’extension de leurs champs de
compétences : la loi
rend passible de prison le refus de donner son ADN, étend la possibilité
des fouilles pour les agents de police et les agents de sécurité,
autorise la police municipale à intervenir dans les cages d’escaliers
sous certaines conditions, étend les possibilités de perquisition...
Deux ans plus tard, la loi pour la sécurité intérieure – dite loi
Sarkozy – de février 2003, par un article rendant illégale l’occupation
des halls d’immeubles, a démultiplié les possibilités de harcèlement
policiers dans les quartiers. Comme la loi sur les contrôles d’identité,
elle va permettre de valider des pratiques mais aussi de stimuler leur
systématisation. D’autres lois ont permis d’intensifier la productivité
répressive. La loi du 9 mars 2004, dite Perben II, en instituant un
régime spécial pour la « délinquance organisée » a ainsi permis
d’arrêter des groupes entiers, de prolonger les gardes à vue, de les
étendre aux mineurs de plus de 16 ans et d’empêcher tout regroupement
dans la rue.
Mathieu Rigouste, La domination policière