Propos recueillis par Jérôme Cordelier
Pour le politologue, professeur à Sciences
Po Paris et auteur de "La France au front " (Fayard, 2014),
l'enracinement du FN permettra des victoires nationales.
Pascal Perrineau considère que les bons résultats du Front national dans les scrutins locaux vont permettre leur ancrage territorial et favoriser le développement du parti de Marine Le Pen. Interview.
Le Point : Le premier tour des départementales démontre-t-il indéniablement l'enracinement du Front national ?
Pascal Perrineau : Bien sûr. Jusqu'à maintenant, le Front national avait peu d'élus, sauf dans les régions où la proportionnelle le lui permettait. Tout change depuis un an. À la faveur des municipales, puis de ces départementales, le FN est en train de se constituer un vivier d'élus locaux. Pour les prochaines échéances électorales, il bénéficiera de candidats implantés localement, qui disposeront de réseaux et de relais sur leur territoire. Ce qui va permettre à cette formation politique de dépasser le cadre de son électorat naturel. Le FN était cantonné à l'est d'une ligne Le Havre-Perpignan, il est maintenant capable de s'implanter sur des zones qui étaient naguère des terres de mission : à l'est, mais aussi au centre ou encore au sud-ouest.
Indice parmi d'autres, son succès inattendu en Charente-Maritime par exemple...
Oui, ce résultat notamment démontre la nationalisation de son électorat. Celui-ci s'étend désormais au-delà des bastions traditionnels du FN, des régions anciennes où la droite s'est radicalisée (Paca), des territoires en souffrance de reconversion industrielle (Nord-Pas-de-Calais). Au premier tour des départementales, le FN a percé dans la Sarthe, l'Indre-et-Loire, la Vendée, le Cher... Il est désormais présent partout en France. Il devient un vrai parti national.
Cet enracinement, de votre point de vue, est durable ?
C'est un processus d'enracinement profond. Le FN est massivement présent au second tour. Il aura la clé des élus. Il guigne même des départements.
Est-il en mesure d'en gagner ?
Ce n'est pas impossible. Au second tour, il faudra suivre attentivement ce qui se passera dans l'Aisne, le Gard, le Vaucluse.
Vivons-nous un nouveau chapitre de notre histoire politique ?
Toutes nos institutions, nos modes de scrutin s'étaient jusqu'à présent adaptés à la bipolarisation politique. La réalité entre de moins en moins dans ce cadre. Que va-t-il se passer maintenant ? Comment ce jeu à trois forces va-t-il pouvoir s'adapter à des règles définies pour un affrontement bipolaire ? Le diagnostic est facile à dresser, la réponse est plus difficile à donner. La crise de représentation politique risque de s'accentuer, puisqu'un électeur sur quatre peut estimer que le parti pour lequel il vote n'est pas représenté dans les institutions à son juste poids. Nous vivons un nouveau chapitre de notre histoire politique, puisque nous avons aujourd'hui trois forces aussi implantées localement. Et, très souvent, les victoires locales précèdent les victoires nationales.
Pascal Perrineau considère que les bons résultats du Front national dans les scrutins locaux vont permettre leur ancrage territorial et favoriser le développement du parti de Marine Le Pen. Interview.
Le Point : Le premier tour des départementales démontre-t-il indéniablement l'enracinement du Front national ?
Pascal Perrineau : Bien sûr. Jusqu'à maintenant, le Front national avait peu d'élus, sauf dans les régions où la proportionnelle le lui permettait. Tout change depuis un an. À la faveur des municipales, puis de ces départementales, le FN est en train de se constituer un vivier d'élus locaux. Pour les prochaines échéances électorales, il bénéficiera de candidats implantés localement, qui disposeront de réseaux et de relais sur leur territoire. Ce qui va permettre à cette formation politique de dépasser le cadre de son électorat naturel. Le FN était cantonné à l'est d'une ligne Le Havre-Perpignan, il est maintenant capable de s'implanter sur des zones qui étaient naguère des terres de mission : à l'est, mais aussi au centre ou encore au sud-ouest.
Indice parmi d'autres, son succès inattendu en Charente-Maritime par exemple...
Oui, ce résultat notamment démontre la nationalisation de son électorat. Celui-ci s'étend désormais au-delà des bastions traditionnels du FN, des régions anciennes où la droite s'est radicalisée (Paca), des territoires en souffrance de reconversion industrielle (Nord-Pas-de-Calais). Au premier tour des départementales, le FN a percé dans la Sarthe, l'Indre-et-Loire, la Vendée, le Cher... Il est désormais présent partout en France. Il devient un vrai parti national.
Cet enracinement, de votre point de vue, est durable ?
C'est un processus d'enracinement profond. Le FN est massivement présent au second tour. Il aura la clé des élus. Il guigne même des départements.
Est-il en mesure d'en gagner ?
Ce n'est pas impossible. Au second tour, il faudra suivre attentivement ce qui se passera dans l'Aisne, le Gard, le Vaucluse.
Vivons-nous un nouveau chapitre de notre histoire politique ?
Toutes nos institutions, nos modes de scrutin s'étaient jusqu'à présent adaptés à la bipolarisation politique. La réalité entre de moins en moins dans ce cadre. Que va-t-il se passer maintenant ? Comment ce jeu à trois forces va-t-il pouvoir s'adapter à des règles définies pour un affrontement bipolaire ? Le diagnostic est facile à dresser, la réponse est plus difficile à donner. La crise de représentation politique risque de s'accentuer, puisqu'un électeur sur quatre peut estimer que le parti pour lequel il vote n'est pas représenté dans les institutions à son juste poids. Nous vivons un nouveau chapitre de notre histoire politique, puisque nous avons aujourd'hui trois forces aussi implantées localement. Et, très souvent, les victoires locales précèdent les victoires nationales.
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