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mercredi 16 novembre 2016

Céline et Oscar Wilde contre la horde humanitaire




Esprit provocateur, paradoxal et insaisissable, Oscar Wilde ne cesse de nous émerveiller plus de cent ans après sa mort, à la manière d’un Nietzsche ou du génial Chesterton d’Orthodoxie (« le monde moderne n’est pas mauvais ; il est même trop bon ! »).


Dans son opuscule sur le socialisme, il tord le cou au monde moderne, à sa philanthropie, et aussi au matérialisme d’une civilisation qui voit les peuples succomber les uns après les autres à la richesse et à l’ennui d’une vie ordinaire sans spiritualité et surtout sans génie ; d’ailleurs à la même époque le brillant australien Charles H. Pearson tord aussi le cou au déclin du caractère européen dans le monde : découvrez National Life and Character sur archive.org.

Oscar Wilde s’en prend avec rage à la charité de nos clergés déchus, de nos stars et des nos milliardaires – qui ne veulent plus payer d’impôts mais nous recouvrir de réfugiés et des dollars de leurs fondations. A ce jeu d’ailleurs l’Afrique ou l’Asie gagnent, et l’Europe ou l’Amérique perdent. Car la philanthropie est le cheval de bataille de la mondialisation anti-occidentale. La fondation Rockefeller parle même de guérilla philanthropique ! Mais voyons Wilde : il écrit que « la majeure partie des hommes gâche sa vie par un altruisme excessif et mauvais pour la santé, tout cela parce qu’il est plus facile d’avoir de la sympathie pour la souffrance que pour la pensée. »

Avant le keynésianisme, Wilde remarque que les remèdes ne guérissent pas la maladie ; ils sont même une partie de cette maladie. Le keynésianisme est parent monétaire de la psychanalyse, maladie qui se faisait passer pour la cure. Wilde est bien sûr anticapitaliste, mais un anticapitaliste anarchiste ; il n’aime pas ce monde dominé par le journalisme et la masse, mais il méprise le bon riche plus que le mauvais riche. En effet,
« il est à la fois immoral et injuste d’utiliser la propriété pour soulager les maux qui débouchent de l’institution de cette propriété. Et de toute manière les gens qui font le plus de mal sont les gens qui essaient de faire le plus de bien. »
Les affaires sont pavées de bonnes intentions !
Wilde reprend l’épisode de Jésus et du parfum, en montrant combien Jésus méprise ici l’humanitarisme et la valeur matérielle des biens à laquelle il substitue la valeur symbolique. Message dur à comprendre pour certains.
« Et les disciples, le voyant, en furent indignés, disant : À quoi bon cette perte ? Car ce parfum aurait pu être vendu pour une forte somme, et être donné aux pauvres. Et Jésus, le sachant, leur dit : Pourquoi donnez-vous du déplaisir à cette femme car elle a fait une bonne œuvre envers moi ; car vous avez toujours les pauvres avec vous, mais moi, vous ne m’avez pas toujours (*)… »
Les pauvres, on les a toujours, et aussi les bonnes âmes qui veulent prendre aux uns pour donner aux autres. Tolkien aussi en fera l’axe de son dernier et sublime épisode dans le Seigneur des Anneaux (le nettoyage de la comté) ; qui remarque d’ailleurs que les répartiteurs (le fisc en fait) aiment bien prendre mais moins partager. De toute manière la distribution généreuse ne fait que corrompre le pauvre, remarque Wilde dans son opus sur le socialisme :
« Les meilleurs des pauvres ne sont jamais reconnaissants. Du fait de la charité, les pauvres sont mécontents, désobéissants et rebelles. Les autres se sont vendus pour un très mauvais potage. »
On le voit d’ailleurs en France et en Europe d’ailleurs : plus le quidam est assisté, plus il tempête contre les marchés qui ne font que prêter aux dirigeants socialistes de quoi entretenir leur masse d’électeurs mécontents. Mais comme dit un autre génie, Céline, abasourdi par l’obsession moderniste du sozial,
« le monde est encore plein de martyrs qui crèvent du désir de nous libérer puis d’être titularisés par la même aubaine dans des fonctions pas fatigantes, d’un ministère ou d’un autre, avec une retraite. »
(*) Matthieu, 26, 8-12.