Nicolas Bonnal
Je ne suis pas vraiment pro-américain,
mais je dois pourtant reconnaître une chose : je n’ai jamais vu le
pouvoir américain aussi dominant dans le monde. C’est le talon de
fer. Quels artistes !
L’Europe fait ce que l’oncle Sam
lui dit de faire, y compris de détruire la Syrie et la Lybie et de
se faire envahir, y compris de signer un traité de commerce qui
achèvera son économie, y compris de se préparer à une nouvelle
guerre froide.
La danseuse Merkel a gardé la Grèce
dans l’euro pour faire plaisir à son maître Obama. La France a
pris son coup de Mistral, et en réalité les Européens n’ont
jamais été aussi disciplinés de leur histoire, car ils obéissent
au dollar, « vrai Saint-Esprit, plus précieux que du sang », a dit
mon Céline.
C’est l’Amérique de l’Atlantique
à l’Oural.
Mais les Européens ont sans doute eu
raison de rester soumis. Car il ne fait pas bon chatouiller un tigre
de papier qui sait vous remettre dans le droit chemin sans bouger le
petit canon. Je l’avais souligné l’an dernier dans mon texte sur
la débâcle russe : l’Amérique humiliait la Russie en faisant
s’écrouler son rouble et sa croissance ; et les européens se
sabordaient en sanctionnant les Russes, promis à une soumission
iranienne.
En dépit des analyses des Sapir et
autres, l’économie russe continue son écroulement et le rouble
est à nouveau très bas. Ce n’est pas Obama ou le Pentagone qui se
plaindront de Poutine, car ils en auront fait un bon usage en lui
agitant le chiffon rouge, puis en rameutant les troupes dociles :
opération Crimée et châtiment…
Cette année, c’est au tour du Brésil
hostile de connaître les joies de la crise.
On ne cachera pas non plus le sort
risible des Chinois, cherchant à maintenir leur monnaie à la baisse
face au dollar. Peter Schiff s’est trompé : les Chinois veulent
continuer à être soumis et à vendre leur froide camelote aux
américains, dont ils ont financé la surconsommation depuis vingt
ans, après tant d’autres, allemands ou japonais. Les Chinois
communistes ou nationalistes veulent demeurer à disposition de leur
maître, c’est tout. Comme disait encore Céline, expert en
masochisme, ils ne veulent pas connaître d’autre trique.
Puis les matières premières et
l’énergie se sont écroulées, sanctionnant toutes les économies
qui en dépendaient, et donc les économies industrielles qui
exportaient. Et l’Amérique totalement improductive n’a pas de
souci à se faire.
Le dollar à intérêt zéro n’a pas
cessé de monter, l’or promis par les apocalyptiques de baisser,
l’euro de patauger, les monnaies ennemies d’être humiliées.
Tout cela se fait bien sûr par
enchantement. C’est le triomphe de la magie et du virtuel sur le
reste du troupeau de nos petites âmes programmées depuis l’enfance
par Gaga et les tortues Ninja, le triomphe du NASDAQ sur toute
économie réelle.
C’est le triomphe de l’économie
sacerdotale dont le grand-prêtre est l’oncle Sam.
Nous verrons si la roche tarpéienne
est près du Capitole. Mais depuis le temps…