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samedi 5 septembre 2015

Pour maîtriser l’immigration, il faut s’attaquer aux sources



Pour maîtriser l’immigration, il faut s’attaquer aux sources
 Jean-Michel Léost
 
Une étude publiée dans Le Figaro du 3 septembre montre, sondages à l’appui, que « si 56 % des Français se disent opposés à l’accueil des migrants, les personnes âgées et les classes aisées y sont plus favorables. Les ouvriers et les actifs résolument opposés ». Les sympathisants EELV seraient les plus favorables, suivis des électeurs socialistes et du Front de Gauche, tandis que les électeurs du Front national et les sympathisants Les Républicains manifesteraient majoritairement leur opposition. Alors que la question des immigrés vient de prendre un tour compassionnel avec la diffusion, largement commentée, de la photo d’un enfant mort sur une plage, on peut tirer quelques enseignements de cette enquête.

En 1990, le RPR et l’UDF, alors dans l’opposition, réclamaient dans leur programme la « fermeture des frontières », la « suspension de l’immigration » et voulaient « réserver certaines prestations sociales aux nationaux », soulignant l’ « incompatibilité entre l’islam et nos lois » : un vocabulaire qui appartient plutôt au Front national. Engagements vite oubliés quand ils sont arrivés aux affaires. Actuellement, l’avatar du RPR, Les Républicains, souhaitant sans doute débaucher une partie de l’électorat frontiste ou retenir son propre électorat, reprend une partie de ces thèmes. Les socialistes, eux, la main sur le cœur mais, souvent, le portefeuille à droite, ont bien montré leur sens de la solidarité en 1962, lors de l’exode des pieds-noirs : on se souvient de l’accueil que l’un des leurs, Gaston Deferre, leur réserva à Marseille. C’étaient pourtant des réfugiés français ! Quant aux sympathisants EELV, ils sont favorables à l’accueil de tous les immigrés. Rien d’étonnant : pour eux, la nation est dépassée, elle doit se dissoudre dans une fédération européenne.

Le Figaro constate que cette hostilité à l’immigration est inédite et qu’en 1979, lors de la crise des Boat people, 130.000 Vietnamiens avaient été accueillis. Ce qui permet de saisir une seconde donnée du problème. La méfiance, voire l’hostilité à l’égard des migrants s’explique aussi par la distance culturelle et la crainte qu’ils ne puissent s’intégrer : on avait plus confiance dans la capacité d’intégration de Vietnamiens fuyant l’oppression communiste qu’on n’en a dans celle de migrants venus du Moyen-Orient et d’Afrique, majoritairement, c’est un fait, de religion musulmane – car les chrétiens d’Orient sont reçus au compte-gouttes.

Enfin, intervient le contexte économique. Donner en exemple l’Allemagne, qui doit recevoir 800.000 migrants en 2015, n’a guère de sens : les Allemands ont une économie prospère et un besoin vital d’immigrés pour pallier leur déficit démographique, ce qui n’est pas le cas de la France.
Dans ces conditions, il n’est pas surprenant que le refus l’emporte dans les catégories socioprofessionnelles les moins favorisées, pour beaucoup victimes d’une insécurité physique, économique et sociale. En revanche, selon Le Figaro, les cadres et professions intellectuelles supérieures sont à 57 % en faveur de l’accueil des migrants. Demandez à l’occasion à ces privilégiés – ou à ces journalistes et ces artistes prompts à donner des leçons – d’appliquer leurs principes et d’accueillir des immigrés dans leur appartement des quartiers chics ou dans leur résidence secondaire : vous verrez la tête qu’ils feront. Accueillir des migrants, c’est bon pour les autres !

La question de l’immigration est trop grave pour en occulter des facettes ou pour s’abriter sous sa bonne conscience. Ceux qui jouent sur la sensibilité et l’émotion pour masquer leur impuissance sont des illusionnistes, qui plus est, irresponsables parce qu’ils ne prévoient pas les lendemains. Pour maîtriser l’immigration, il faut s’attaquer aux sources, non aux symptômes.