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dimanche 6 septembre 2015


Christian Vanneste

 

« Vous n’avez pas le droit de penser autrement. » Dans une société totalitaire, c’est ce principe qui commande toute « information » depuis la maternelle jusqu’au journal du soir. Nous vivons un grand moment de totalitarisme mou. Comment ? 56 % des Français seraient hostiles à l’accueil des migrants ! Insupportable ! La machine à décérébrer s’est donc mise en marche ! Vous devez penser qu’il faut accueillir les réfugiés ! Vous devez admirer la merveilleuse Angela Merkel et les Allemands. Vous devez condamner le méchant Victor Orban. Vous devez applaudir à la décision du Président Hollande de s’aligner sur l’Allemagne pour répartir les arrivants entre les pays européens.

Il y a des dates dans l’Histoire où le discours d’un homme politique a fait basculer une opinion par la force et la qualité de ses arguments. C’était l’époque où la politique dans les démocraties visait encore le néo-cortex, s’adressait à la raison des citoyens, cherchait à les convaincre. Que de temps perdu ! L’émotion emporte la conviction des foules avec force et plus rapidement. Une photo-choc reprise par tous les médias, à laquelle se réfèrent tous les politiques avec une voix chargée de compassion, voilà qui va renverser le courant en un éclair. Un enfant de trois ans sans vie sur une plage… Comment rester insensible ? Il faut ne pas avoir de cœur pour empêcher ces gens qui fuient la guerre et les persécutions de trouver refuge en Europe.

Malheureusement, il y a toujours de mauvais esprits qui raisonnent. La famille de l’enfant est de nationalité syrienne et kurde d’appartenance. Elle a quitté Damas à cause de la guerre, s’est réfugiée à Kobané, la ville assiégée par l’État islamique et a fui par la Turquie pour rejoindre sans visa le Canada. La responsabilité de la Turquie est claire : elle soutient l’État islamique, n’a rien fait pour aider les Kurdes de Kobané, bombarde ceux qui, la fuyant, se sont réfugiés en Irak, laisse passer les djihadistes européens en Syrie, aller et retour, et n’entrave pas l’activité des passeurs entre Syrie et Grèce. De plus, elle pourrait accueillir les Kurdes puisque une partie importante de sa population est constituée de Kurdes. Mais critiquer ce membre de l’Otan serait inconvenant. D’ailleurs les 120.000 Arméniens chrétiens arrivés en France après la 1ére guerre mondiale venaient déjà de Turquie… où ils avaient été persécutés, pour beaucoup massacrés, par les Turcs et par les Kurdes aussi, les uns et les autres étant musulmans.

La Turquie veut la peau de Bachar Al-Assad et entretient la guerre en Syrie contre le régime, avec le soutien des États du Golfe, celui des USA, et le nôtre. L’État islamique fait régner une épouvantable terreur sur une grande partie du pays qu’il contrôle. Nous faisons semblant de lui faire la guerre et il continue d’avancer. Cette inaction hypocrite rend coupables nos dirigeants, non de ne pas accueillir les réfugiés, mais de préserver ceux qui les font fuir au lieu de les écraser. La sinistre réputation des islamistes fait confondre la fuite d’une minorité pourchassée avec la recherche de l’eldorado où un membre de la famille, ou du village, va vous aider à vous fondre dans la foule. Tous les migrants ne sont pas des réfugiés.

La différence de traitement entre les images des atrocités commises par l’État islamique et la photo du jeune enfant sur la plage turque saute aux yeux. Il ne faut pas faire de publicité aux djihadistes, dit-on. Mais un homme décapité, brûlé vif, une femme lapidée, réduite en esclavage et vendue au marché, cela peut aussi créer de l’émotion, une émotion, guerrière celle-là, qui déclencherait dans l’opinion le désir d’un juste châtiment dont nous avons largement les moyens.