Après Alain Juppé, grimé en "Ali Juppé", c'est au tour de François
Fillon de subir une campagne de dénigrement. A l'extrême droite,
certains le surnomment "Farid Fillon" et lui reprochent son discours vis
à vis de l'islam.
Alain Juppé a estimé que la campagne d'intox le
surnommant "Ali Juppé" était "dégueulasse". Elle a sûrement contribué à
sa défaite. François Fillon va-t-il subir la même chose? Depuis l'entre
deux tours, le candidat à la présidentielle est régulièrement visé pour d'anciennes prises de positions ou discours sur l'islam ou l'immigration. Après son score tonitruant du premier tour,
les identitaires, des soutiens de Marine Le Pen et autres opposants se
sont penchés sur ses déclarations sur l'islam. Et, désormais, ils
surnomment l'ancien Premier ministre "Farid Fillon" :
Mosquée d'Argenteuil et visas pour les Algériens
Juppé
était accusé de complaisance avec les Frères musulmans et d'avoir fait
construire une mosquée à Bordeaux. Soit, pour la première accusation, un
raccourci trop simple et, pour l'autre, un mensonge puisqu'aucune
mosquée n'a été construite dans la capitale girondine. Pour Fillon, de
nombreuses personnes issues de la "fachosphère", un ensemble
d'internautes, blogueurs et de sites d'extrême droite dont les messages
parviennent à percer également à droite, ont repris de vieilles
interviews ou discours de l'ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy.
Un
exemple : l'inauguration de la mosquée Al Ihsan à Argenteuil, une des
plus grandes d'Europe, en juin 2010. Comme contre Juppé, le site Riposte
Laïque (que Fillon avait dit ne pas connaître et qui pourtant l'a soutenu indirectement avant le premier tour), a repris ces accusations. Ils reprochent au candidat sa présence à l'inauguration et certains passages de son discours :
"Les
personnes de confession musulmane et leur lieu de culte sont encore
trop souvent l’objet de discrimination et la cible d’agressions que nous
ne pouvons pas tolérer."
"La réalité de l’Islam de France aujourd’hui, c’est celle d’un Islam de paix et de dialogue."
La vidéo du discours a notamment été déterrée par Marion Maréchal-Le Pen, sur son compte Facebook.
Riposte
Laïque est un site anti islam, tout comme l'Observatoire de
l'islamisation, qui a publié mardi une liste des "membres de l'équipe
Fillon qui collaborent avec des mosquées en mairie". Autre article mardi
: "Quand François Fillon promettait à Alger d'augmenter les visas pour
les Algériens". Sans préciser que du fait de la fin de la colonisation,
les deux Etats, France et Algérie, ont des règles spécifiques concernant
la circulation de leurs ressortissants. Depuis 1964, les obstacles se
sont multipliés et la France est accusée de délivrer au compte-gouttes
les visas… de court séjour (maximum un an).
Non, Fillon n'est pas le "candidat des minarets"
Autre
exemple, ce tweet issu d'un montage réalisé par des soutiens de Marine
Le Pen, et repris par le sénateur FN Stéphane Ravier, le président du
groupe FN au conseil régional d'Ile-de-France Wallerand de Saint-Just ou
le député européen Bernard Monot
Il
s'agit d'un faux. Grossier : la date de l'interview est le 4 décembre
2016. Dimanche prochain. Pour la citation, Libération l'a démontré, il
manque tout le contexte. Voici ce qu'a vraiment dit François Fillon le 4
décembre 2009, quelques jours après la votation suisse interdisant la
construction de nouveaux minarets :
"Le récent
référendum suisse sur les minarets suscite des débats. Je l’aborde avec
quelques convictions simples et claires […] La France est laïque, mais
la France est tout naturellement traversée par un vieil héritage
chrétien qui ne saurait être ignoré par les autres religions installées
plus récemment sur notre sol. Il est normal et légitime que les
pratiquants puissent exercer leur foi dans des conditions dignes. Et on
ne dira jamais à quel point il faut préférer des mosquées ouvertes à des
caves obscures. Quant aux minarets, qui sont d’ailleurs assez peu
nombreux en France, je dis simplement qu’ils doivent s’inscrire de façon
raisonnable et harmonieuse dans notre environnement urbain et social."
Le discours est toujours disponible sur le site de Matignon. Et la suite montre que François Fillon n'est pas vraiment le candidat le plus "pro-minarets" actuellement :
"Le
récent référendum suisse sur les minarets suscite des débats. Je
l’aborde avec quelques convictions simples et claires. Dans notre
République, chacun est libre de croire ou de ne pas croire, mais chacun
doit afficher ses choix avec sensibilité et avec respect de l’autre.
Toutes les confessions sont respectables, mais ce qui ne l’est pas,
c’est le prosélytisme agressif."