En avançant la candidature Peillon, les grandes fédérations du PS
lancent un message simple : la victoire aux présidentielles n’est pas
possible.
Il fallait oser la candidature Peillon ! L’ancien ministre de l’Éducation, dont son directeur de cabinet disait à l’époque que son ministre était un cerf-volant à piloter depuis le sol, sort tout droit d’un rayonnage de bibliothèque (il est professeur associé à l’université de Neuchâtel, en Suisse) où son parti le stockait en attendant des jours meilleurs. Et patatras, le voici candidat à la primaire, face à Valls.
Il s’agit de la fédération de Paris, d’abord : menée par Patrick Bloche, le député du 11e arrondissement, elle exprime bien les sentiments d’Anne Hidalgo elle-même pour le Premier ministre, et sa préférence naturelle pour un intellectuel bobo qui veut davantage de fonctionnaires pour régler les problèmes du pays.
La fédération des Bouches-du-Rhône s’est aussi empressée d’apporter ses voix à Peillon. Mennucci, député de Marseille, se répand désormais partout pour expliquer que Peillon défend la ligne traditionnelle du parti en matière économique, et qu’il constitue donc un meilleur candidat que Valls.
Avec le soutien des fédérations du Nord, de Paris et des Bouches-du-Rhône, Peillon devient subitement un candidat sérieux au PS.
L’objectif de ceux qui soutiennent Peillon est clair. Non seulement, il s’agit de faire du tout sauf Valls. Mais l’enjeu consiste aussi à juguler la tentation « libérale » de l’ancien Premier ministre, partisan des baisses de charge pour les entreprises et d’une politique de l’offre.
D’où les démarchages de Taubira et de Touraine, avant le démarchage de Peillon. En vain, les intéressées ont refusé.
Et sur cette ligne, Peillon est plausible. Il a d’ailleurs fait l’éloge de la création de postes de fonctionnaires dans sa déclaration de candidature.
Son éventuelle désignation comme Premier Secrétaire permettra aux clans et aux factions de reprendre le pouvoir dans la maison de la rue de Solférino.
Ici, c’est l’élite technocratique et économique de gauche qui décide et qui montre la voie. Et sa voie est ringarde à souhait.
Éric Verhaeghe
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Il fallait oser la candidature Peillon ! L’ancien ministre de l’Éducation, dont son directeur de cabinet disait à l’époque que son ministre était un cerf-volant à piloter depuis le sol, sort tout droit d’un rayonnage de bibliothèque (il est professeur associé à l’université de Neuchâtel, en Suisse) où son parti le stockait en attendant des jours meilleurs. Et patatras, le voici candidat à la primaire, face à Valls.
Un coup des aubrystes… et des Parisiens
Selon le Canard Enchaîné, ce sont les aubrystes qui ont pris l’initiative de le démarcher. L’affirmation est plausible. Mais, pour prendre corps, elle s’est appuyée sur le soutien de deux autres fédérations qui rejettent Manuel Valls.Il s’agit de la fédération de Paris, d’abord : menée par Patrick Bloche, le député du 11e arrondissement, elle exprime bien les sentiments d’Anne Hidalgo elle-même pour le Premier ministre, et sa préférence naturelle pour un intellectuel bobo qui veut davantage de fonctionnaires pour régler les problèmes du pays.
La fédération des Bouches-du-Rhône s’est aussi empressée d’apporter ses voix à Peillon. Mennucci, député de Marseille, se répand désormais partout pour expliquer que Peillon défend la ligne traditionnelle du parti en matière économique, et qu’il constitue donc un meilleur candidat que Valls.
Avec le soutien des fédérations du Nord, de Paris et des Bouches-du-Rhône, Peillon devient subitement un candidat sérieux au PS.
Une candidature qui torpille Valls
Pour Manuel Valls, le ralliement des trois grandes fédérations du PS à un rival sorti du chapeau, un cerf-volant que ses soutiens espèrent piloter facilement, est une très mauvaise nouvelle. Le poids de Valls face à Macron et à Mélenchon n’est déjà pas évident. La rivalité avec Montebourg ne l’aidait pas. Mais l’intervention d’une candidature mièvre, certes, mais soutenue par l’appareil, complique encore un peu plus son jeu.L’objectif de ceux qui soutiennent Peillon est clair. Non seulement, il s’agit de faire du tout sauf Valls. Mais l’enjeu consiste aussi à juguler la tentation « libérale » de l’ancien Premier ministre, partisan des baisses de charge pour les entreprises et d’une politique de l’offre.
Le PS ne croit pas une victoire possible en mai 2017…
En avançant la candidature Peillon, les grandes fédérations du PS lancent un message simple : la victoire aux présidentielles n’est pas possible. Donc, pas besoin de se rassembler derrière Valls, puisque ce rassemblement servirait seulement à légitimer celui-ci à gauche sans sauver l’Élysée. L’appareil du PS, avec ses éléphants immuables, pose donc le problème de façon très simple : puisque la primaire ne sert pas à choisir un futur président de la République, choisissons le candidat qui évite le pire.D’où les démarchages de Taubira et de Touraine, avant le démarchage de Peillon. En vain, les intéressées ont refusé.
… mais cherche à sauver ses circonscriptions en juin
Le PS a désormais un objectif de guerre extrêmement simple : perdre le moins de circonscriptions possible en juin, dans des législatives qui s’annoncent comme une superbe débandade. Le pari qui est fait aujourd’hui consiste à soutenir que ni la ligne Valls ni la ligne Montebourg ne sont capables de colmater les brèches. Seul un retour aux positions traditionnelles du PS : le marché, l’Europe, la culture, les fonctionnaires, la dépense publique, permettra de limiter les dégâts.Et sur cette ligne, Peillon est plausible. Il a d’ailleurs fait l’éloge de la création de postes de fonctionnaires dans sa déclaration de candidature.
2022 dans les esprits, déjà
Au-delà de cette préoccupation pragmatique, qui annonce une faible mobilisation pour la présidentielle et un effort surtout porté pour les enjeux locaux, c’est la conduite du parti jusqu’en 2022 qui se décide aujourd’hui. Hidalgo, Aubry et les Marseillais ont structurellement besoin d’affaiblir les « libéraux » pour conserver la mainmise de l’appareil à l’horizon 2022. Le choix de Peillon comme porte-drapeau le prouve ; d’ailleurs, Peillon est un rêveur incapable de tenir un appareil politique.Son éventuelle désignation comme Premier Secrétaire permettra aux clans et aux factions de reprendre le pouvoir dans la maison de la rue de Solférino.
L’étrange sociologie socialiste
On notera, en tout cas, que l’équipe Hollande est viscéralement rejetée par les socialistes des grandes villes. Parisiens et Marseillais soutiennent Peillon (avec des exceptions notables comme celle de Cambadélis, Caresche ou Le Guen à paris, de Vallaud-Belkacem à Lyon, à ce stade en tout cas). Les Lyonnais (Gérard Collomb en personne) soutiennent Macron. Les Lillois soutiennent Peillon.Ici, c’est l’élite technocratique et économique de gauche qui décide et qui montre la voie. Et sa voie est ringarde à souhait.
Éric Verhaeghe
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