Alexandre Latsa |
A la fin de l’année 2010, j’écrivais un
texte intitulé Moscou, capitale de l’Europe dans lequel j’appelais à la
réalisation d’un projet politique reposant sur la création d’une entente
approfondie entre Paris, Berlin et Moscou.
Une entente des nations dominantes du continent afin de permettre la réalisation du projet français d’union continentale, un demi-siècle après qu’il ait été formulé par le Général De Gaulle.
Ce projet aurait eu le double intérêt historique et géopolitique de permettre le rapprochement de l’Europe de l’Ouest et de la Russie mais aussi et surtout de permettre le renforcement d’une forme d’équilibre et de multipolarité au sein de l’hémisphère nord.
Près de quatre ans après la publication de ce texte, il semble que la chance de voir se réaliser ce moment historique, destiné à permettre l’émergence d’un monde multipolaire et donc d’équilibre des puissances, soit totalement passée.
L’occupation croissante des espaces politiques, moraux, culturels et sécuritaires des nations européennes par les réseaux américains et l’Otan, processus entamé en 1945, a entrainé l’Atlantisation (on peut parler d’Otanisation) que vit l’Europe actuellement, processus qui devrait vraisemblablement s’accentuer avec la concrétisation de l’union transatlantique en 2015.
A l’Est du continent, de nouveaux signaux sont également apparus. Le réveil russe s’est accompagné d’une mise en garde à l’Occident, après la guerre en Géorgie, que l’extension de l’Otan ne pouvait pas être infinie mais était clairement ressentie par Moscou comme une pression et une agression. Les propositions russes d’architecture européenne commune de sécurité se sont-elles heurtées au mur étoilé de l’Otan, tandis que l’intégration militaire au sein de l’Eurasie n’a pour l’instant trouvé des oreilles qu’à l’Est et non à l’Ouest du continent.
Moscou capitale du « monde russe » ?
C’est dans ce contexte global que l’Ukraine, martyrisée par la coalition occidentale, vient de perdre sans doute à jamais une partie de son territoire qui a fait sécession en demandant de rejoindre la fédération de Russie. En se choisissant un destin russe, les habitants de Crimée ont sans aucun doute réveillé une flamme endormie au cœur d’un « Monde russe » en sommeil et qui n’attend de Moscou que la constitution d’un modèle propre à rejoindre, modèle compatible tant avec les aspirations des peuples concernés que les réalités socio-culturelles et particularités locales.
Les images des jeunes femmes de Crimée, en fleurs et en pleurs de bonheur, ne peuvent que rappeler les scènes identiques que l’opinion internationale médusée avait pu contempler en 1999 lorsqu’une colonne de blindés russes avait pénétré le territoire serbe du Kosovo, prenant de court les troupes de la coalition occidentale et de l’Otan. Mais à la différence de 1999, la Russie a cette fois les moyens de sa politique, tandis que la coalition occidentale semble elle de nouveau prise de cours et dépourvue de tous recours.
La Russie : artisan d’un nouvel ordre mondial ?
Assiste-t-on à la fin d’un monde et pourquoi pas du monde unipolaire ?
C’est plausible et les évènements en Crimée ne sont peut être que la première manifestation de ce long processus, entamé il y a plusieurs années, et qui devrait sans aucun doute provoquer de nouvelles secousses géopolitiques dans un avenir proche. Un processus qui pourrait accentuer l’incompréhension et la rupture stratégique profonde entre la Russie et l’UE mais aussi plus largement entre la Russie et l’Occident. Cette rupture devrait s’accompagner dans un futur très proche d’un lourd refroidissement des relations comme le laissent visiblement comprendre les premières réactions outre atlantiques à ce sujet et notamment les regrets publics de John Kerry de la guerre froide, période durant laquelle : « L’Amérique pouvait prendre de très mauvaises décisions et gagner quand même, car elle était quasiment la seule puissance économique et militaire. Ce n'est plus vrai aujourd'hui ».
Ce refroidissement des relations entre l’Amérique et la Russie pourrait de nouveau plonger l’hémisphère nord dans un scénario bipolaire, comme ce fut le cas depuis 1945. Au cours de cet intervalle, historiquement, Moscou était toujours mis devant le fait accompli, contraint de réagir, mais finissait systématiquement par subir les décisions géostratégiques de l’Occident. Des décisions qui mettaient Moscou en permanence dans une position doublement inconfortable : tout faire pour ne pas se couper de l’Occident bien que systématiquement martyrisé par ce dernier, tout en tentant de défendre ses intérêts stratégiques.
Le problème du modèle Occidental
Mais à la différence de cet intervalle historique de moins d’un demi-siècle, si le monde Occidental a accentué son extension territoriale, politique et miliaire à l’Est et vers l’Est, il est désormais considérablement affaibli, ruiné et surtout sans nouveau modèle à proposer autre que celui de l’après-guerre froide, fortement mis à mal par la crise de 2008.
Le bloc de l’Est en constitution est lui concentré autour d’une Russie qui a désormais de nouveau les moyens de ses ambitions mais aussi et surtout dispose d’une élite ayant une stratégie définie et une forte volonté politique. Une élite qui a clairement défini les objectifs stratégiques qu’elle entend affirmer et ambitionne de plus en plus clairement le développement de son propre modèle, un modèle que la Russie entend faire rayonner au cœur du « Monde russe ».
Si les événements en Géorgie en 2008 puis en Crimée en 2014 ont démontré que Moscou ne souhaitait définitivement plus se voir imposer la géostratégie de son étranger proche, un autre grand changement stratégique semble s’être lentement mais sûrement opéré au sein des élites russes au cœur des dernières années et notamment depuis le début du troisième mandat de Vladimir Poutine.
Un changement survenu lors de la dernière réunion du club de Valdaï pour l’analyste Alexandre Rhar, puisque Vladimir Poutine y a utilisé une rhétorique très conservatrice et montré qu’il préparait la Russie à autre chose et notamment au fait qu’elle n’appartient pas à l’Ouest, comme c’était plus ou moins admis jusqu'à récemment.
Le retour de l’idéologie en Russie ?
Ce changement structurel semble se traduire par la certitude que la Russie n’aspire désormais plus à rattraper l’Occident sur le plan moral, sociétal ou culturel, comme ce fut systématiquement le cas depuis 1991. Moscou a visiblement pris l’initiative de clairement accentuer la tendance à la rupture en insistant désormais clairement sur les différences de civilisation entre la Russie et l’Ouest. Les autorités russes viennent à ce sujet de confier au ministère de la Culture (dirigé par Vladimir Medinski) l’élaboration d’une nouvelle politique culturelle qui permet de mieux comprendre le contour civilisationnel que la Russie souhaite s’attribuer et donc la direction que devrait suivre sa géopolitique du futur proche.
Le rapport semble déterminer la fin du processus entamé en 1991 à la chute du mur, concrétisé au sein de la constitution de 1993 qui affirmait qu’aucune idéologie ne pouvait être désormais établie comme idéologie d’Etat.
Axé sur le thème global « La Russie n'est pas l’Occident, l'Europe ni l’Orient », le rapport définit la Russie comme une civilisation distincte, avec ses modes de fonctionnements propres, comme une civilisation complexe et multiforme. Une définition que l’on peut rapprocher du terme utilisé par Vladimir Poutine lors de ce même dernier sommet de Valdaï, lorsqu’il avait qualifié la nature de l’Etat civilisation russe de « complexité florissante » (Цветущая Сложность), une expression créée par l’un des pères de l’Eurasisme politique et philosophique, Constantin Leontiev .
Vers l’apparition d’un modèle russe ?
Le rapport définit cette « culture » comme l’ensemble des valeurs et des normes de conduite contenues dans le patrimoine culturel et historique, matériel et immatériel. La culture y est également définie comme le cadre unificateur de la société russe et la manifestation du code civilisationnel du pays.
Le rapport constate l’échec du système civilisationnel communiste comme du modèle libéral-occidental post-communiste mais affirme qu’au travers de ces différentes périodes, le « noyau civilisationnel » de la Russie est restée inchangé, ce qui témoigne de sa continuité, terme sur lequel le rapport insiste.
Le modèle occidental fondé sur la tolérance et le multiculturalisme y est clairement rejeté, le rapport préconisant lui une immixtion accrue de l’Etat au sein du management de la politique culturelle et surtout au sein des relations interculturelles, interreligieuses et interethniques afin de favoriser l’unité du pays et protéger le pays des vagues d’agression informatives (un rapport avec les récentes accusations russes contre le bureau de l’Otan accusé de zombifier la jeunesse russe ?) qui détruisent son identité, menacent sa souveraineté culturelle, entravent le développement humain, détruisent son héritage, le ridiculisent et le dénaturent.
Signe de la défiance lourd envers le modèle européen le ministre de la Culture, Vladimir Medinski s’est également félicité du fait que la Russie ne « devienne pas une seconde hollande, ce pays où l’on légalise le mariage pour tous et on l’on fume de la marijuana ». Il a également critiqué et lourdement remis en question le modèle d’intégration à la française selon lui en plein échec.
Le monde russe : nouvelle Eurasie ?
Longtemps, le critère de référence d’opposition à l’Occident était l’Eurasisme.
Un concept à multiples facettes servant à démontrer la particularité civilisationnelle russe. Ce concept qui est réapparu au sein des élites russes depuis le début des années 2000 semble s’imbriquer au sein du monde russe que l’on peut assimiler au monde de l’Est dans ses dimensions majoritairement slaves et orthodoxes.
Le statut de Russien (Rossianin) créé par les autorités russes au cours des années 90 semble sur le point de disparaître, remplacé en quelque sorte par la réaffirmation de la « Russité » au sens large. Cette Russité semble basée sur le « Monde russe », concept qui semble visiblement définir la sphère d’influence que la Russie souhaite vraisemblablement développer et travailler.
Peut-on parler d’Eurasie restreinte (des Balkans orthodoxes à l’extrême Orient russe en passant par le Caucase et la Sibérie, soit l’Eurasie intérieure) pour définir en gros le contour de ce monde russe et les plausibles sphères d’influence en son sein de la Russie et de l’Union Douanière ?
Le christianisme orthodoxe comme ciment du « monde russe » ?
Enfin, mais peut-être surtout, Vladimir Medinski a rappelé un point cardinal de la rupture civilisationnelle totale avec l’Occident qu’est le retour au christianisme. Comme il l’a affirmé : « La Russie sera peut-être l'un des derniers gardiens de la culture européenne, des valeurs chrétiennes et de la véritable civilisation européenne ».
Une imbrication des valeurs chrétiennes au sein d’un monde russe en parfaite adéquation avec la définition donnée par Vladimir Poutine quant à la substance religieuse du citoyen de ce monde russe. D’après le président russe, dont le rapport emprunte nombre de concepts, « Un Russe, ou plutôt une personne appartenant au monde russe, pense d'abord et avant tout qu'un homme a une haute destinée morale. Les valeurs occidentales sont (à l'inverse) que la réussite se mesure à la réussite personnelle ».
Une entente des nations dominantes du continent afin de permettre la réalisation du projet français d’union continentale, un demi-siècle après qu’il ait été formulé par le Général De Gaulle.
Ce projet aurait eu le double intérêt historique et géopolitique de permettre le rapprochement de l’Europe de l’Ouest et de la Russie mais aussi et surtout de permettre le renforcement d’une forme d’équilibre et de multipolarité au sein de l’hémisphère nord.
Près de quatre ans après la publication de ce texte, il semble que la chance de voir se réaliser ce moment historique, destiné à permettre l’émergence d’un monde multipolaire et donc d’équilibre des puissances, soit totalement passée.
L’occupation croissante des espaces politiques, moraux, culturels et sécuritaires des nations européennes par les réseaux américains et l’Otan, processus entamé en 1945, a entrainé l’Atlantisation (on peut parler d’Otanisation) que vit l’Europe actuellement, processus qui devrait vraisemblablement s’accentuer avec la concrétisation de l’union transatlantique en 2015.
A l’Est du continent, de nouveaux signaux sont également apparus. Le réveil russe s’est accompagné d’une mise en garde à l’Occident, après la guerre en Géorgie, que l’extension de l’Otan ne pouvait pas être infinie mais était clairement ressentie par Moscou comme une pression et une agression. Les propositions russes d’architecture européenne commune de sécurité se sont-elles heurtées au mur étoilé de l’Otan, tandis que l’intégration militaire au sein de l’Eurasie n’a pour l’instant trouvé des oreilles qu’à l’Est et non à l’Ouest du continent.
Moscou capitale du « monde russe » ?
C’est dans ce contexte global que l’Ukraine, martyrisée par la coalition occidentale, vient de perdre sans doute à jamais une partie de son territoire qui a fait sécession en demandant de rejoindre la fédération de Russie. En se choisissant un destin russe, les habitants de Crimée ont sans aucun doute réveillé une flamme endormie au cœur d’un « Monde russe » en sommeil et qui n’attend de Moscou que la constitution d’un modèle propre à rejoindre, modèle compatible tant avec les aspirations des peuples concernés que les réalités socio-culturelles et particularités locales.
Les images des jeunes femmes de Crimée, en fleurs et en pleurs de bonheur, ne peuvent que rappeler les scènes identiques que l’opinion internationale médusée avait pu contempler en 1999 lorsqu’une colonne de blindés russes avait pénétré le territoire serbe du Kosovo, prenant de court les troupes de la coalition occidentale et de l’Otan. Mais à la différence de 1999, la Russie a cette fois les moyens de sa politique, tandis que la coalition occidentale semble elle de nouveau prise de cours et dépourvue de tous recours.
La Russie : artisan d’un nouvel ordre mondial ?
Assiste-t-on à la fin d’un monde et pourquoi pas du monde unipolaire ?
C’est plausible et les évènements en Crimée ne sont peut être que la première manifestation de ce long processus, entamé il y a plusieurs années, et qui devrait sans aucun doute provoquer de nouvelles secousses géopolitiques dans un avenir proche. Un processus qui pourrait accentuer l’incompréhension et la rupture stratégique profonde entre la Russie et l’UE mais aussi plus largement entre la Russie et l’Occident. Cette rupture devrait s’accompagner dans un futur très proche d’un lourd refroidissement des relations comme le laissent visiblement comprendre les premières réactions outre atlantiques à ce sujet et notamment les regrets publics de John Kerry de la guerre froide, période durant laquelle : « L’Amérique pouvait prendre de très mauvaises décisions et gagner quand même, car elle était quasiment la seule puissance économique et militaire. Ce n'est plus vrai aujourd'hui ».
Ce refroidissement des relations entre l’Amérique et la Russie pourrait de nouveau plonger l’hémisphère nord dans un scénario bipolaire, comme ce fut le cas depuis 1945. Au cours de cet intervalle, historiquement, Moscou était toujours mis devant le fait accompli, contraint de réagir, mais finissait systématiquement par subir les décisions géostratégiques de l’Occident. Des décisions qui mettaient Moscou en permanence dans une position doublement inconfortable : tout faire pour ne pas se couper de l’Occident bien que systématiquement martyrisé par ce dernier, tout en tentant de défendre ses intérêts stratégiques.
Le problème du modèle Occidental
Mais à la différence de cet intervalle historique de moins d’un demi-siècle, si le monde Occidental a accentué son extension territoriale, politique et miliaire à l’Est et vers l’Est, il est désormais considérablement affaibli, ruiné et surtout sans nouveau modèle à proposer autre que celui de l’après-guerre froide, fortement mis à mal par la crise de 2008.
Le bloc de l’Est en constitution est lui concentré autour d’une Russie qui a désormais de nouveau les moyens de ses ambitions mais aussi et surtout dispose d’une élite ayant une stratégie définie et une forte volonté politique. Une élite qui a clairement défini les objectifs stratégiques qu’elle entend affirmer et ambitionne de plus en plus clairement le développement de son propre modèle, un modèle que la Russie entend faire rayonner au cœur du « Monde russe ».
Si les événements en Géorgie en 2008 puis en Crimée en 2014 ont démontré que Moscou ne souhaitait définitivement plus se voir imposer la géostratégie de son étranger proche, un autre grand changement stratégique semble s’être lentement mais sûrement opéré au sein des élites russes au cœur des dernières années et notamment depuis le début du troisième mandat de Vladimir Poutine.
Un changement survenu lors de la dernière réunion du club de Valdaï pour l’analyste Alexandre Rhar, puisque Vladimir Poutine y a utilisé une rhétorique très conservatrice et montré qu’il préparait la Russie à autre chose et notamment au fait qu’elle n’appartient pas à l’Ouest, comme c’était plus ou moins admis jusqu'à récemment.
Le retour de l’idéologie en Russie ?
Ce changement structurel semble se traduire par la certitude que la Russie n’aspire désormais plus à rattraper l’Occident sur le plan moral, sociétal ou culturel, comme ce fut systématiquement le cas depuis 1991. Moscou a visiblement pris l’initiative de clairement accentuer la tendance à la rupture en insistant désormais clairement sur les différences de civilisation entre la Russie et l’Ouest. Les autorités russes viennent à ce sujet de confier au ministère de la Culture (dirigé par Vladimir Medinski) l’élaboration d’une nouvelle politique culturelle qui permet de mieux comprendre le contour civilisationnel que la Russie souhaite s’attribuer et donc la direction que devrait suivre sa géopolitique du futur proche.
Le rapport semble déterminer la fin du processus entamé en 1991 à la chute du mur, concrétisé au sein de la constitution de 1993 qui affirmait qu’aucune idéologie ne pouvait être désormais établie comme idéologie d’Etat.
Axé sur le thème global « La Russie n'est pas l’Occident, l'Europe ni l’Orient », le rapport définit la Russie comme une civilisation distincte, avec ses modes de fonctionnements propres, comme une civilisation complexe et multiforme. Une définition que l’on peut rapprocher du terme utilisé par Vladimir Poutine lors de ce même dernier sommet de Valdaï, lorsqu’il avait qualifié la nature de l’Etat civilisation russe de « complexité florissante » (Цветущая Сложность), une expression créée par l’un des pères de l’Eurasisme politique et philosophique, Constantin Leontiev .
Vers l’apparition d’un modèle russe ?
Le rapport définit cette « culture » comme l’ensemble des valeurs et des normes de conduite contenues dans le patrimoine culturel et historique, matériel et immatériel. La culture y est également définie comme le cadre unificateur de la société russe et la manifestation du code civilisationnel du pays.
Le rapport constate l’échec du système civilisationnel communiste comme du modèle libéral-occidental post-communiste mais affirme qu’au travers de ces différentes périodes, le « noyau civilisationnel » de la Russie est restée inchangé, ce qui témoigne de sa continuité, terme sur lequel le rapport insiste.
Le modèle occidental fondé sur la tolérance et le multiculturalisme y est clairement rejeté, le rapport préconisant lui une immixtion accrue de l’Etat au sein du management de la politique culturelle et surtout au sein des relations interculturelles, interreligieuses et interethniques afin de favoriser l’unité du pays et protéger le pays des vagues d’agression informatives (un rapport avec les récentes accusations russes contre le bureau de l’Otan accusé de zombifier la jeunesse russe ?) qui détruisent son identité, menacent sa souveraineté culturelle, entravent le développement humain, détruisent son héritage, le ridiculisent et le dénaturent.
Signe de la défiance lourd envers le modèle européen le ministre de la Culture, Vladimir Medinski s’est également félicité du fait que la Russie ne « devienne pas une seconde hollande, ce pays où l’on légalise le mariage pour tous et on l’on fume de la marijuana ». Il a également critiqué et lourdement remis en question le modèle d’intégration à la française selon lui en plein échec.
Le monde russe : nouvelle Eurasie ?
Longtemps, le critère de référence d’opposition à l’Occident était l’Eurasisme.
Un concept à multiples facettes servant à démontrer la particularité civilisationnelle russe. Ce concept qui est réapparu au sein des élites russes depuis le début des années 2000 semble s’imbriquer au sein du monde russe que l’on peut assimiler au monde de l’Est dans ses dimensions majoritairement slaves et orthodoxes.
Le statut de Russien (Rossianin) créé par les autorités russes au cours des années 90 semble sur le point de disparaître, remplacé en quelque sorte par la réaffirmation de la « Russité » au sens large. Cette Russité semble basée sur le « Monde russe », concept qui semble visiblement définir la sphère d’influence que la Russie souhaite vraisemblablement développer et travailler.
Peut-on parler d’Eurasie restreinte (des Balkans orthodoxes à l’extrême Orient russe en passant par le Caucase et la Sibérie, soit l’Eurasie intérieure) pour définir en gros le contour de ce monde russe et les plausibles sphères d’influence en son sein de la Russie et de l’Union Douanière ?
Le christianisme orthodoxe comme ciment du « monde russe » ?
Enfin, mais peut-être surtout, Vladimir Medinski a rappelé un point cardinal de la rupture civilisationnelle totale avec l’Occident qu’est le retour au christianisme. Comme il l’a affirmé : « La Russie sera peut-être l'un des derniers gardiens de la culture européenne, des valeurs chrétiennes et de la véritable civilisation européenne ».
Une imbrication des valeurs chrétiennes au sein d’un monde russe en parfaite adéquation avec la définition donnée par Vladimir Poutine quant à la substance religieuse du citoyen de ce monde russe. D’après le président russe, dont le rapport emprunte nombre de concepts, « Un Russe, ou plutôt une personne appartenant au monde russe, pense d'abord et avant tout qu'un homme a une haute destinée morale. Les valeurs occidentales sont (à l'inverse) que la réussite se mesure à la réussite personnelle ».
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